Mars 1194
Intermède [Sergeï]: De retour de son expérience mortelle sur les terres Arpad, Sergeï est convoqué par le Voïvode Vladimir Rustovitch pour effectuer un compte-rendu complet de la destruction de Dame Sigrid Arpad. Il en apprend plus sur le Clan Tzimisce auquel appartient son maître, et sa famille, les Bessarab, sur la guerre millénaire qu'ils se livrent contre les autres Clans pour la domination de la région, et sur la menace mortelle que fait planer une nouvelle lignée maudite, les Usurpateurs. Il reçoit des explications sur la mort de Dame Sigrid, et notamment sur la dette dont dispose sa créatrice, la Princesse Nova Arpad, sur sa tête. Les deux camps ennemis sont satisfaits de la disparition d'une infante turbulente, mais les traditions doivent être respectées, et Sergeï en paiera le prix une nuit...
Intermède [Niklaus]: Niklaus reprend sa vie dans son village, désormais convaincu de la justesse de ses actes pour défendre la Vierge des Lépreux, des créatures décadentes et sanglantes qui règnent sur les nuits transylvaniennes. Reprenant ses travaux de sculpture comme sa mission apostolique, il rencontre rarement sa Dame à la lisière des bois obscurs, mais se satisfait de plus en plus pleinement de sa nouvelle condition.
Intermède [Dmitri]: Dmitri a vécu deux longues années dans les bois du domaine de Sigrid Arpad, et ses talents de chasseur et de survivant ont attiré sur lui l'œil exercé de Mitru. Ce dernier a longuement écouté la forêt et les esprits lui compter la Mort Ultime de son ennemie, et il a acquiescé aux recommandations de la Terre. Il compte revendiquer le solide Dmitri, s'il s'en montre digne. Fuyant avec ses nouveaux compagnons, celui-ci trouve sans grande difficulté un poste de pisteur auprès de la maisonnée de Radoslav Bessarab, dont les veneurs ont été décimés par les loups (voir l'acte I). C'est dans les bois entourant Sibiu qu'il rencontre pour la première fois Mitru, qui malgré tous ses talents de forestier parvient à le surprendre sans grande peine une sombre nuit d'automne. Peu de mots furent échangés mais Mitru le soumit et à sa merci, lui offrit ou lui imposa, c'est selon, le premier Lien du Sang. Depuis il revoit le Chasseur lorsqu'il égare ses pas dans les bois, volontairement ou non, et l'emprise de la Bête sur lui grandit de mois en mois.
Sergeï reçut une lettre cachetée aux armes de la Maison Arpad dans les premiers jours du mois de mars 1194. Immédiatement soucieux, il découvrit dissimulés sous des mots courtois et une écriture déliée une menace à peine voilée. Il avait huit jours pour se rendre à Mediasch, auprès de la Princesse Nova Arpad, pour s'acquitter de la dette qu'il avait envers elle, où son destin serait scellé. Nulle mention n'était faite de ses compagnons de misère, mais après tout, en tant que noble, il semblait légitime qu'il recueille les louanges lors de ses réussites, et qu'il pâtisse de ses échecs... Il décida néanmoins de convoquer rapidement Dmitri et Niklaus, en leur dissimulant qu'ils n'étaient pas directement visés par le parchemin.
Si Dmitri répondit immédiatement à son appel, et se mit à son service comme l'exigeait son rang, il n'en fut pas de même du Père Niklaus, ce qui exigea des deux hommes de se rendre à Sulina, le petit hameau perdu à la lisière de la forêt. Accompagnés de deux gardes mis à sa disposition par le knezi, ils convainquirent sans grande difficulté Niklaus de la gravité de la situation et du danger représenté par la Princesse Nova Arpad, et ils se hâtèrent vers Mediasch.
Après un voyage sans incident, ils traversèrent à la tombée de la nuit les faubourgs de la riche ville marchande située sur les bords d'un des sous-affluent du Danube, la rivière Târnava Mare. Ils gagnèrent sur les indications des gardes la plus riche auberge de la ville, celle du Dragon, située à l'ouest des faubourgs, en direction de Balgrad. Après un repas éblouissant, à peine gâché par les rumeurs qui parcouraient les rangs des notables et marchands attablés dans la grande salle au sujet d'une étrange maladie touchant les animaux depuis quelques mois, nuisant ainsi au commerce, ils échangèrent quelques mots avec l'aubergiste, Ivan Janiseck. Ils repérèrent également un étrange convive au somptueux pourpoint émeraude, attablé seul, et ne faisant mine de ne manger à aucun moment, malgré l'assiette fumante posée devant lui. Souhaitant tester quelque idée, le Père Niklaus proposa à l'aubergiste de bénir son établissement, et priant en agitant ostensiblement sa croix, il se rapprocha de l'inconnu, qui ne fit pas mine de bouger d'un pouce, souriant même au religieux.
La nuit fut difficile pour Dmitri, bien loin d'être habitué à de tels fastes culinaires, et le brave Niklaus s'occupa tant bien que mal du malade avant de rejoindre Sergeï au petit matin pour se présenter à la princesse Nova Arpad. Ils rejoignirent d'abord le château, pensant qu'elle s'y trouverait mais ils découvrirent intrigués que la ville était régentée par un conseil nobiliaire, et les hommes qu'ils interrogeaient ne semblaient pas connaître la Princesse, bien qu'ils reconnussent bien volontiers l'influence de la famille royale de Hongrie sur la ville. Se renseignant plus avant, ils apprirent que la famille Arpad disposait d'un magnifique manoir dans le faubourg, et s'y rendirent. Le Père Niklaus effectua un petit détour, allant interroger quelques bouviers aux alentours de la ville sur l'étrange maladie qui ravageait les bêtes. Il n'apprit pas grande chose de nouveau, mais les jeunes gens lui affirmèrent néanmoins leur certitude dans l'œuvre du démon qui s'était abattu sur la cité.
Enfin les deux hommes parvinrent au manoir, où ils furent introduits par le sénéchal de Dame Arpad, arborant ses couleurs sur sa livrée, les quatre bandes d'argent et quatre de gueules. Ils durent patienter jusqu'à la tombée de la nuit, profitant de l'hospitalité du très riche manoir: bibliothèque largement fourni, boudoir aux tapis et tapisseries splendides, repas aux nombreux mets fins et inconnus... A la tombée de la nuit ils furent convoqués dans une petite étude, où la puissante Nova Arpad les attendait. Vêtue d'une riche robe d'un rouge profond, elles les accueillit d'un léger signe de la main, les invitant à s'asseoir dans les profonds fauteuils de velours. Ses longs cheveux ailes de corbeau cascadaient dans son dos, ne dissimulant rien de sa peau d'albâtre et de son regard bleu de glace qui les scrute avec dédain.
La discussion qui s'en suit fut difficile pour les deux hommes. Le mépris affiché de la créature de la nuit pour les hommes les choqua, de même que certains propos qu'elle leur tint qui leur firent se rendre compte de l'ignorance dans laquelle les laissaient leur maître respectif. Elle leur rappela que leur vie reposait entre ses mains, mais qu'elle leur offrait une chance d'être pardonnés, en lui rendant un service. Plusieurs habitants de la ville ont disparu, dont un de ses suivants. Elle ne se rappelait plus du nom des disparus, excepté celui de Maalivar Hustov, qui régit le quartier marchand depuis l'échoppe des Trois Tonneaux. Elle leur conseille de questionner son sénéchal pour le reste des détails, et éviter ainsi de l'ennuyer plus avant. Et sur un sourire désarmant elle leur donna quatre nuits pour retrouver les disparus, ou sa miséricorde serait nulle et non avenue...
L'enquête des deux hommes les menèrent à questionner et interroger plusieurs mortels, dont le cuisinier de l'auberge du Cheval vert, au sujet d'un des disparus, le tenancier Iaroslav Atov. Ils découvrirent l'existence d'un groupuscule de quatre personnes qui se réunissaient une nuit par semaine. D'après les descriptions et les indices rassemblés par la suite ils firent le lien avec d'anciens cultes païens et remontèrent jusqu'à Dragos Rulienko, un noble valaque récemment arrivé en ville, vassal de la famille Bessarab. Interrogeant le chevalier, ils apprirent le fin mot de l'histoire après quelques menaces déguisées. Dragos et ses comparses adoraient les anciens esprits valaques, et tous les jeudis se rendaient dans un ancien temple romain oublié de la forêt pour honorer leurs Dieux par des sacrifices et des offrandes, notamment à Havnor, Dieu du Ciel. Une semaine auparavant, de noirs démons issus des entrailles de la terre s'étaient jetés sur eux et le noble, effondré, reconnu sa faute et sa fuite éperdue devant les monstres. Ses compagnons furent capturés selon lui, et il vit dans le mépris de lui-même depuis, promettant même à Sergeï de se joindre à lui s'il décidait de partir en quête de ses compagnons.
Avant de partir pour les profondeurs des bois entourant Mediasch, le groupe rencontra un nouveau Caïnite de la cité, Vassily Taltos. En échange d'une dette orale envers le marchand richement vêtu, ils apprirent notamment le nom et la localisation d'un ancien vampire réputé pour sa sagesse et sa connaissance tant de Mediasch que de ses habitants, le Père Fedor Kerinski. Ce dernier résidait au sein de l'église de Sainte-Dymphan, la protectrice des fous et des simples d'esprit, conjurée notamment pour chasser les démons possédant les âmes perdues. Ils furent bien accueillis et obtinrent de nombreuses informations sur le monde de la nuit, s'étonnant une nouvelle fois de la complexité de ses règles, et du peu d'information dont ils disposaient. Il leur enseigna l'existence de nombreux Clans, des lignées de vampires aux pouvoirs et aux humeurs bien différents, et notamment le nom de celui du Prince Nova Arpad, Ventrue. Ils questionnèrent le prêtre sur le terme Caïnite, et en apprirent un peu plus sur la malédiction de Caïn et le meurtre d'Abel. Ils obtinrent peu de réponses sur leurs questions quand aux gargouilles, créations magiques des Tremere ou nouvelle lignée étrangère. Quant à leur enquête, le Père les informa qu'une Enfant de Malkav, Anna, l'avait interrogé sur le Dieu Havnor, et sur les cultes lui étant consacrés. Mais il n'avait jamais entendu ce nom auparavant et et ne pouvait leur en dire plus. Ils firent quelques impairs, rapidement pardonnés par le Père Kerinski qui blâma leurs maîtres de leur manque d'éducation.
Soucieux de ne pas faire d'erreur, et de ne pas froisser la susceptibilité de Dame Arpad, Sergeï et Niklaus se rendent à son manoir pour la rencontrer et lui révéler les informations qu'ils avaient amassées jusqu'ici, ainsi que la marche à suivre désormais. Ils assistèrent à une démonstration des pouvoirs charismatiques surnaturels de la princesse, qui les abasourdit de sa présence et leur imposa de ne venir trouver son auguste personne qu'avec une preuve formelle de la mort des disparus. Ne se risquant pas à un conflit potentiel avec la noble Caïnite ils décidèrent de quitter la cité à l'aube le lendemain pour gagner le temple, accompagnés et guidés par Dragos Rulienko. Dmitri ayant récupéré de sa soudaine maladie, ils s'assurèrent également des deux gardes confiés par le knezi de Sibiu. Après quelques heures de marche à travers les bois, où disparut peu à peu toute présence animale, ils gagnèrent l'ancien édifice en ruine;
Une clairière abrite les restes effondrés d'un temple de pierre blanche. Une grande arche permet d'accéder à l'intérieur, où subsiste quelques colonnes. La majeure partie du bâtiment est néanmoins effondrée, et les lourdes pierres sont recouvertes par une végétation agressive, ronces, orties... Seul un petit périmètre semble régulièrement dégagé à l'entrée, permettant d'y accéder sans difficulté. Ils découvrirent sur le sol de pierre et les murs de nombreuses traces de lutte, du sang et des brûlures. Un petit autel de bois est encore recouvert d'offrandes, notamment de petits objets de bois et de métal, ainsi que des ossements manifestement animaux. Dmitri, à l'aide des explications de Dragos et ses talents de pisteur, reconstitua la bataille perdu par les disparus, et vit qu'une des colonnes dissimulait sans doute une entrée secrète. Une fois le lierre et les mauvaises herbes retirées, ils découvrirent de nombreuses inscriptions ésotériques, certaines même sataniques selon le Père Niklaus mais aucune trace d'un mécanisme dissimulé. Un seul mot put être décrypté par le groupe, Baal.
Sergeï et Dimitri harnachèrent alors les chevaux à des cordes pour briser la colonne, et peut-être révéler une entrée secrète. En effet un puits obscur s'ouvrit devant eux lorsque le lourd tronc de pierre s'abattit au sol, révélant un étroit escalier en colimaçon taillé dans le roc. S'armant de torches et de courage, ils descendirent de quelques mètres dans les profondeurs de la terre, découvrant une immense pièce circulaire de la taille du temple, au sol spongieux jonchés de cadavres d'animaux à divers stades de décomposition. Deux couloirs en partaient. Le premier les mena à une petite chambre à peine meublée, d'un simple lit de bois et de paille, de quelques étagères et d'un bureau couvert d'artefacts qui les firent frissonner de dégoût: statuettes démoniaques couvertes de sang séché, crânes et os étranges, bougies noires, amulettes singulières. Dmitri découvrit une dague sacrificielle qui lui semblait avoir quelques valeurs et la dissimula dans son havresac. Sur un des murs, en hauteur, une inscription en latin défia leurs talents d'interprète mais fut apprise par cœur par le Père Niklaus. Une correspondance relativement récente se trouvait sur le bureau, rédigée dans une langue qui leur était complètement inconnue. Enfin, dans une cachette secrète dissimulée dans un des murs, ils trouvèrent précautionneusement emballé un parchemin couvert de symboles cunéiformes, visiblement très ancien.
Le deuxième couloir les mena à une geôle abondamment doté en matériel de torture: chevalet, croix de Saint-André, outils divers... Trois hommes y étaient enchaînés. Deux d'entre aux semblaient encore en vie, bien qu'aux portes de la mort, leur corps littéralement supplicié. Le troisième n'était plus qu'un cadavre, les yeux brûlés au fer rouge, la langue arrachée, un pieu de bois planté dans le cœur. Ses membres rigidifiés semblaient indiquer une mort déjà ancienne. Le Père Niklaus tenta d'aider les deux pauvres hères, que Dragos reconnut comme ses compagnons, Iaroslav Atov et Dimitri Balas. Malheureusement leurs blessures tant physiques que spirituelles ne permettaient qu'une mort douce pour abréger leur calvaire, miséricorde que leur accorda le prêtre. Sur les conseils de Sergeï ils enveloppèrent le troisième corps des vêtements et tissus découverts dans la chambre, afin de le protéger du soleil, se souvenant du destin de Sigrid Arpad. Sans grande difficulté ils mirent également le feu à ce qui pouvait être détruit, avant de quitter le temple maudit.
Regagnant Mediasch avant la tombée de la nuit, ils patientèrent à l'entrée du manoir Arpad, pour être reçus une nouvelle fois par le sénéchal, puis par le Prince. Ils apprirent avec grande surprise que Maalivar Hustov, bien qu'empalé, était toujours en vie, ou quelque soit le terme utilisé pour un non-mort. Nova Arpad sembla se désintéresser du sort des deux mortels ou des descriptions qui lui firent des lieux de captivité des prisonniers, mais blêmit à la mention du mot "Baal", chose que le chevalier Sergeï ne remarqua qu'un court instant . Elle le dédouana de sa dette envers elle, et se fendit même d'un cours remerciement, leur offrant l'hospitalité de sa ville lorsqu'il souhaiterait y venir pour affaires. Ne souhaitant pas s'attarder plus longtemps, ils passèrent néanmoins échanger quelques informations avec le Père Fedor Kerinski qui leur traduisit notamment l'inscription en latin "A la gloire de Rome, signé du nom d'Artémus Démus Scipion". Ils repartirent à l'aube le lendemain pour Sibiu, et regagnèrent sans difficulté leurs pénates. Ils interrogèrent leurs maîtres au sujet de l'étrange parchemin, mais nul ne sut ne serait-ce que leur indiquer la langue utilisée. Quand aux lettres, il s'agissait selon le Voïvode Rustovitch d'un dialecte venu du loin orient. Ne disposant pour le moment d'aucun autre moyen de traduire leurs trouvailles, ils les conservèrent précieusement en attendant de découvrir un érudit capable de les aider.
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